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03/03/2005

Pas tendre, hier...

Mon ami Raymond Alcovère me fait remarquer que je n’ai pas été tendre, hier, avec les génies incompris autoproclamés. Il a raison. J’ai un peu chargé… Pourtant j’ai du mal à le regretter.
Je voudrais juste préciser que mon agacement ne vise pas les auteurs débutants en tant que tels (tout auteur débute un jour évidemment…), mais bien ceux qui, encore mal dégrossis, sans aucune idée de ce que travailler une écriture veut dire, et surtout sans la moindre idée de ce qu’est la littérature aujourd’hui, affichent une prétention phénoménale. L’expérience de « Salmigondis », notre revue littéraire amateur pour laquelle nous recevons plus de 1000 manuscrits par an (ce qui, au passage, est beaucoup trop vu la faiblesse de notre structure) m’a confronté maintes fois à ces génies incompris autoproclamés, incapables d’accepter la critique, incapables de se relire avec un minimum de recul ni de retoucher une seule virgule à leur premier jet, bercés d’illusions dangereuses, mais prétentieux comme des empereurs. Depuis 7 ans que je reçois des manuscrits (ça fait donc plusieurs milliers) j’ai largement eu l’occasion de faire mes petites statistiques : les auteurs les plus prétentieux, les plus têtus, les plus désagréables, font toujours partie de ceux dont l’écriture est la moins aboutie.
J’aurais des centaines d’anecdotes, devenues croustillantes avec le recul, à vous raconter sur le sujet. Là, tout de suite, j’ai pas le temps et peut-être que vous non plus, mais je crois bien que ça fournira de la matière à ce blog pour longtemps.

11:30 Publié dans Livre | Lien permanent

02/03/2005

Les dessous de la vie littéraire (5)

« Vous écrivez ? Alors lisez-moi ! »
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Un truc marrant aussi, c’est les génies incompris autoproclamés. Ces gens qui commencent tout juste à écrire, n’ont jamais imaginé qu'un premier jet puisse être perfectible, mais tiennent la jambe au premier écrivain qui passe pour le persuader que ça y est, une œuvre inoubliable vient de sortir de leurs tripes (j’ai toujours jugé cette métaphore du plus mauvais goût, et surtout je n’ai jamais compris en quoi écrire dans la souffrance pouvait garantir une quelconque valeur littéraire...). Selon eux, il resterait à faire le tout dernier pas – une bagatelle ! – pour que la face de l’humanité soit éclaboussée de lumière : éditer leur chef d'oeuvre.
On en trouve un peu partout, de ces oiseaux-là : au boulot, dans les soirées chez les copains, dans les réunions familiales. On en trouve aussi, surtout, devant nos stands sur les salons et fêtes du livre. Faciles à reconnaître : ils sont timides au début, je dirais même furtifs, leurs yeux guettent le moment propice, leurs lèvres affichent un rictus de bienveillance (toujours cette satanée bienveillance !), et sitôt que l’instant paraît opportun ils vous sautent dessus avec leur liasse de manuscrits, ou bien, s’ils ne les ont pas sur eux, avec un stylo et un calepin pour noter votre adresse.
« Vous êtes écrivain ? C’est super parce que j’écris ! Et j’aimerais qu’on me lise attentivement, qu’on me dise ce qu’on pense vraiment. Et puis surtout comment trouver un éditeur. Je peux vous envoyer mes textes ? »
Durant le bref échange (le monologue, pour être exact), il n’a été nullement question de ce que, moi, j’écris. Ce qui serait un préalable vu que j'occupe quand même la place de l’auteur derrière la table, stylo prêt à entrer en action, et ce sont mes livres qui sont en pile dessus, n’attendant qu’une bonne âme pour avoir le privilège d’être dédicacés (et peut-être lus ?). Non, ces écrivaillons-là ne viennent pas sur les salons pour voir des écrivains, encore moins pour les lire. Ils viennent pour y trouver la maraine de Cendrillon. La bonne fée qui les métamorphosera en auteurs célèbres.
Ne pas mordre, mais rester ferme. Surtout ne pas donner son adresse ! Il m’est arrivé plusieurs fois de répondre, après avoir lu attentivement, et de donner des impressions aussi franches que détaillées, en précisant que mon avis n’avait rien d’universel. Cela m’a pris du temps parce qu’il faut se creuser la cervelle quand on veut exprimer le plus honnêtement son ressenti face à un texte. J’ai reçu en retour quelques proses outrées de génies incompris (alors que je m’efforce toujours de trouver du positif dans un texte, et de le dire, même lorsque globalement je n’accroche pas). Quant aux éventuels remerciements, je les attends encore…
Pour ce qui me concerne, je me souviens très bien que personne, en dehors de mon épouse, n’a jamais lu mes textes d’un œil critique à l’époque où je n’étais pas publié. Aujourd’hui encore, le cercle de ceux qui expriment un avis, même concis, se réduit à peu de monde. Je l’ai déjà dit, je ne suis pas entouré de littéraires. Et parmi les quelques amateurs de littérature que je fréquente, rares sont ceux qui me parlent de ce que j’écris. C’est par le biais de la presse que je peux avoir un semblant de retour. Des écrivains rencontrés au hasard de mes pérégrinations littéraires, et avec lesquels j’ai noué une relation intéressante, formulent également des commentaires, que je crois sincères. Mais tout bien compté, ça ne fait pas lourd. Quant à savoir qui serait susceptible d’éditer le manuscrit qu’un auteur inconnu m’a gracieusement flanqué dans la boîte aux lettres… je ne sais pas moi-même qui éditera mon prochain livre !

15:35 Publié dans Livre | Lien permanent