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18/12/2005

Chroniques express 9

CARNET DE LETTONIE
Christophe Blain
Ed. Casterman

Les résidences d’artistes sont à la mode, elles se développent comme des champignons. Si elles favorisent souvent des échanges intéressants avec le public, il faut reconnaître que certains écrivains ou plasticiens, faute d’une inspiration réelle pour le thème imposé par l’institution organisatrice de la résidence, n'y produisent pas toujours des œuvres à la hauteur de leur talent.
Christophe Blain, lui, s’est très bien sorti de cet exercice périlleux. Chargé de remettre à son éditeur un carnet de voyage sur la Lettonie après deux courts séjours dans le pays (une semaine en hiver, et une en été), l’auteur de « Isaac le Pirate » a évité le piège qui aurait consisté à nous proposer un guide Gallimard au rabais de la Lettonie. Ici, pas d’historique du pays (la ligue hanséatique, par exemple, n'est mentionnée nulle part, pas même lorsqu'il est question de Riga), pas la moindre carte géographique, et surtout pas d'analyse politico-sociologique. Nous sommes dans le carnet de voyage d’un dessinateur français qui ne connaît pas la Lettonie, et qui ne prétend surtout pas nous en donner un aperçu détaillé après une aussi courte imprégnation. Alors que certains, forts d'une expérience minuscule, s'autoriseraient à instruire les autres, cette modestie honore Christophe Blain.
Notre artiste résident gribouille, croque, et croque encore pour obéir à cette petite voix dans sa tête qui lui demande de dessiner encore et toujours plus : des paysages, des gens, des petites scènes dans la marge, où en quelques traits expressifs il se représente dans ses péripéties lettones. Il dessine dans le froid, il dessine depuis la fenêtre de sa résidence, il dessine dans la voiture pendant que sa guide lui fait traverser le pays. Il ne s’interdit pas quelques tricheries, par exemple ce paysage recomposé à partir de plusieurs éléments aperçus à travers la vitre.
Notre artiste résident écrit aussi, puisque son éditeur le lui impose (il aurait préféré, lui, rapporter un « carnet contemplatif »…). Il écrit à côté de ses dessins, au-dessous, au-dessus, il écrit petit, parfois à la limite de l’illisible, il écrit certaines choses qui lui passent par la tête, des remarques très spontanées, voire candides, et il parvient à créer une certaine proximité. Nous sommes avec lui quand il s’étonne que tout le monde, dans la rue, porte un sac plastique ; nous sommes encore avec lui chaque fois qu’il demande si tout se passe bien avec les Russes, et qu’on lui répond ce sempiternel et ambigu « Ça va. »
Ce qui nous reste de cette lecture, outre l’envie de découvrir nous aussi la Lettonie, c’est l’impression d’avoir vécu avec ce petit monde, tellement vivant, pendant quelques dizaines de pages.

11:40 Publié dans Livre | Lien permanent | Commentaires (0)

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