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22/02/2005

Attention chef d'oeuvre !

Je viens de lire “Le nom”, le roman de Jean-Jacques Nuel qui paraît ces jours-ci aux éditions A contrario. Et je dois dire qu’il a tenu ses promesses.
Un thème peu courant, un style minutieusement ciselé, une trame haletante. Pour peu qu’on s’intéresse à l’histoire de cet écrivaillon raté qui trouve un jour sa voie en déroulant les quatre lettres de son nom sur des centaines de feuilles format A4, et ne tarde guère à proposer aux éditeurs ce qu’il considère comme son chef d’œuvre.
Certes, pour entrer dans l’histoire, et y trouver ce que j’appelle, moi, sans hésiter, du suspens, il faut accepter une intrigue sans ninjas diaboliques, sans monstres aux yeux rouges et aux dents jaunes, ni meurtre en série et autres ingrédients quasi obligatoires dans les romans à suspens. Ici, le suspens provient exclusivement de cette question : « Jusqu’où ira-t-il ? » Ou plutôt « Jusqu’où ira-t-il sans devenir rengaine ? » Jean-Jacques Nuel se livre à une tentative d’épuisement du sujet. Tentative réussie. Tandis que de nombreux romans à l’ambition similaire pataugent très vite dans la semoule, épuisant leur sujet en moins de temps qu'il n'en faut pour tourner quelques pages, celui-ci parvient à offrir toujours de nouveaux angles d’approche, de nouveaux développements inattendus, livrant en même temps qu’une histoire absurde du plus pur style kafkaïen une satire du milieu littéraire, et de l’écrivaillon inconnu qui se prend pour une étoile.
Tour à tour loufoque et touchant, le roman de Jean-Jacques Nuel étonne surtout par la précision de son écriture : sans pathos, sans digression vaseuse, il parvient avec un sujet minimaliste à nous faire voyager, dans l’univers des mots et des phrases, des paragraphes, des pages… dans l’univers du livre. On y croise furtivement des personnages, des régions entières se déroulent sous nos yeux, qui ne sont que des éléments linguistiques auxquels Nuel a prêté une personnalité. La maniaquerie du héros, qui après avoir transformé son patronyme en nom commun prétend tout mettre en œuvre pour lui assurer un avenir florissant, devient elle-même un moteur de l’écriture, un moteur de l’histoire qui patiemment, minutieusement, déroule ses sept chapitres sous nos yeux comme autant d’étapes de la création d’un monde.
Les familiers de Jean-Jacques Nuel reconnaitront ici les thèmes qu’il avait traités dans ses textes courts (l’écriture, la solitude, l’hypertrophie de l’ego, le besoin maladif de laisser une trace) mais ils les retrouveront sous une autre forme, tant il est vrai que l’amplitude du texte les rend différents. Ils pourront constater que Jean-Jacques Nuel, s’il avait déjà fait ses preuves sur la courte distance, se révèle un excellent romancier. Qui s’ignorait...


Extrait :

« La grande vitre carrée de la fenêtre était couverte de buée, occultant l’extérieur. De son doigt, de l’index de la main droite, il commença par tracer au milieu de la vitre une ligne, puis une sorte de point à la suite. Il dessina en dessous les lettres de son nom, liées d’une écriture courbe et continue, avec lenteur, comme il avait fait plus d’une fois, enfant, dans la maison de ses parents. C’était un geste simple et familier, mais enfoui, remontant d’un lointain passé, qui avait précédé la pensée. Il regarda le dessin du nom, le bas des lettres alourdi d’eau. Puis il appliqua son œil derrière l’œil ouvert d’une lettre. La ville de l’autre côté du verre bougeait faiblement, son vacarme étouffé par la vitre froide et trempée. »

18:20 Publié dans Livre | Lien permanent

20/02/2005

Nuel et Châteaureynaud, bientôt !

Je vous avais promis des chroniques sur le recueil de G. O. Châteaureynaud, "Singe savant tabassé par deux clowns" (éd. Grasset), et sur le roman de Jean-Jacques Nuel, Le nom (éd. A contrario). Ils sont tous les deux sur mon bureau. Autrement dit, bientôt sur mon blog sous forme de notes critiques !
En attendant - puisque, j'en suis sûr, vous êtes nombreux à guetter mon feu vert avant de vous précipiter aveuglément chez votre libraire - je vous propose d'aller faire un tour sur le blog de Jean-Jacques Nuel
( http:nuel.hautetfort.com ). Vous y trouverez entre autres bonnes choses "Le journal du nom". Une chronique touchante et instructive de la parution de son roman, où Nuel passe en revue, semaine après semaine, les moindres détails de la publication de son livre, en revenant sur l'année qui a précédé sa sortie en librairie.

20:45 Publié dans Livre | Lien permanent

16/02/2005

Salut !

Ben oui.

22:55 Publié dans Livre | Lien permanent

14/02/2005

Juste pour dire...

Juste pour dire... je vous parlais l'autre jour de G. O. Châteaureynaud, eh bien, Michel Host (Michel, si tu lis ce blog en ce moment _ comme dirait Drucker _ sache que tu y es toujours le bienvenu !), oui, Michel Host donc, me signale qu'il y a justement du nouveau sur la question : G. O. Châteaureynaud vient de sortir un recueil de nouvelles chez Grasset, intitulé "Singe savant tabassé par deux clowns." Je serai à Paris demain, avec quelques heures à tuer : ce sera bien le Diable si, quelques jours après sa parution, je ne mets pas la main dessus (pardon Madame Z, pardon ! je vous promets que si je ne le trouve pas c'est chez vous, comme d'habitude, que je viendrai le commander !). Quant à vous dire ici ce que j'en pense, eh bien je ne m'en priverai pas.
Nuel et Châteaureynaud, telles seront mes prochaines lectures. C'est dit.

21:20 Publié dans Livre | Lien permanent

11/02/2005

Le "nom" est sorti des presses !

C'est fait ! "Le nom", le nouvel ouvrage de Jean-Jacques Nuel, vient de sortir des presses aux éditions A contrario. Premier roman de cet auteur que l'on connnaissait surtout pour ses textes courts, "Le Nom" sera sous peu dans toutes les bonnes librairies. Pour ce qui me concerne, je vais m'arrêter ici parce que je ne l'ai pas encore lu... Mais si les extraits entendus à Saint-Claude en septembre dernier lors du 2ème Festival BD-Littérature du Haut-Jura sont représentatifs de l’ensemble, attendez-vous à lire bientôt un fameux compte-rendu sur ce blog !
NB : Pour en savoir plus sur Jean-Jacques Nuel :
http://jjnuel.free.fr
http://nuel.hautetfort.com

22:15 Publié dans Livre | Lien permanent

10/02/2005

Les dessous de la vie littéraire III



« Tu me diras comment on fait pour acheter ton livre ? »

………

Il faut croire qu’acheter un livre n’est pas une opération évidente pour tout le monde.
Vu le nombre de fois où, ces derniers temps, on m’a posé la question : « Tu me diras comment on fait pour acheter ton livre ? », (toujours au futur, toujours avec un grand sourire bienveillant mais pressé), je conclus que franchir la porte d’une librairie et demander un livre requiert une formation particulière.


Variante : « Tu me diras où tu l’as mis ? » (notez l’emploi, là encore, du futur)
Il y a ceux qui, tout aussi bienveillants, pensent que les livres qu’on trouve en librairies ont été amenés par leurs auteurs. On imagine bien Umberto Eco en costume de colporteur passant vaillamment les cols des Alpes, les reins cassés par sa cargaison d’érudition, attendu comme le papa Noël par nos milliers de responsables rayon littérature étrangère. Ou Stephen King ployant sous la masse de ses pavés, faisant cracher sa Harley d’un bout à l’autre des Etats-Unis pour fourguer sa marchandise aux libraires, puis traversant l’Atlantique, traduisant d’une main, ramant de l’autre et imprimant avec les pieds, pour confier ses œuvres aux libraires européens qui peinent à repousser les hordes de fans impatients…


Autre variante : « Tu pourrais au moins nous en avoir gratos ! » (Sous entendu : « On va quand même pas payer pour tes bouquins, non ? »)
Le petit stock d’exemplaires d’auteur (entre 20 et 30 selon les éditeurs), destinés aux proches et à la constitution de divers dossiers (demandes de bourse, candidatures pour des résidences, etc…) n’est pas inépuisable. Si l’auteur en désire davantage il doit les acheter, comme n’importe qui. Alors, entre nous, puisque certains proches qui mériteraient largement de les avoir en cadeau préfèrent acheter mes livres (une sorte de militantisme…), je ne vois pas pourquoi je me ruinerais pour les offrir à des gens qui, selon toute vraisemblance, ne les liront même pas…

18:20 Publié dans Livre | Lien permanent

08/02/2005

Les dessous de la vie littéraire I


(rubrique destinée à ceux qui, comme moi-même voici encore peu de temps, n'y connaissent rien, mais alors vraiment rien, à la vie du livre. Ceux qui connaissent tout, mais alors vraiment tout sur le sujet, n'y trouveront évidemment pas l'ombre d'un brin d'intérêt...)


« épuisé » = « pilonné »

Il fut un temps où ma candeur était encore plus impressionnante qu’aujourd’hui.
Par exemple, j’imaginais que la mention « épuisé » auprès d’un titre dans la bibliographie de certains auteurs indiquait que le livre avait eu du succès…
C’est en signant mes premiers contrats d’édition, et en faisant plus ample connaissance avec le circuit éditeur-diffuseur-distributeur, que ma candeur a pris une claque. La mention « épuisé » signifie tout bonnement le contraire : lorsqu’un titre se vend bien, il est repris en édition de poche, ce qui pour plusieurs années le mettra à l’abri du pilon, et donc de l'épuisement. Si, sans pour autant susciter la convoitise des collections de poche, les ventes d’un titre se maintiennent sur la durée, il aura le droit d’exister un certain temps. Par contre si, passée la deuxième ou troisième année d’exploitation, le distributeur (entreprise qui gère le stockage, ainsi que les sorties et retours de milliers de titres en cours d’exploitation) constate que les sorties sont inférieures à une cinquantaine d’exemplaires par an, il a le droit de procéder à la destruction du stock restant, donc à ce pilonage tant redouté par les auteurs. A partir de cet instant, le livre ne peut plus être commandé (il aurait du mal, le pauvre, ou alors en très petits morceaux...). On dit, très prosaïquement, qu'il est "épuisé". Cinquante exemplaires : ce chiffre peut paraître dérisoire… il ne l’est pas si on considère que passé les trois mois consécutifs à leur parution la quasi totalité des livres invendus sont retournés au distributeur. Dès lors, vendre plus de cinquante exemplaires d’un titre qui n’est plus visible nulle part devient beaucoup moins évident. Les lecteurs prêts à commander un ouvrage paru deux ou trois ans auparavant, et qui n’a pas eu de succès, existent, mais ils représentent un nombre généralement inférieur à cinquante par an…Pour certains auteurs, les séances de dédicaces sur les salons littéraires sont alors un moyen de prolonger la vie d’un ouvrage devenu introuvable en librairie, et de dépasser la limite fatidique qui signifierait la mise au pilon du titre.
NB : Une autre variante existe, qui évite un temps la mise au pilon, ou ne fait que la repousser ; ce sont les livres soldés que l’on trouve dans des bacs devant les librairies. Dans le contrat d’édition classique, il est stipulé que l’auteur ne touche aucun droit sur les exemplaires vendus en solde, toutefois c’est un sort préférable au pilon, puisqu’il permet encore au livre d’être lu par de nouveaux lecteurs.



19:50 Publié dans Livre | Lien permanent